J’allais écrire un article sur Incendies, le film tiré de la pièce de Wajdi Mouawad, mais je peux pas. Je peux juste pas.

J’ai aucun mot présentement pour décrire ce que je viens de voir. Plus je marchais vers l’appartement, plus les images me frappaient encore, à retardement ou en double. Je ne me souviens pas des dialogues, des répliques, je n’ai que des images à mute en tête. Des flashs.

Qu’est-ce que je pourrais dire de plus ?

Le gars assis à côté de moi sentait fuckin’ bon, en passant à côté de la brasserie Morelli à minuit, la porte était grande ouverte et ça sentait comme dans une brasserie dans mon petit patelin, le vieux cendrier même si ça fait presque cinq ans qu’on ne peut plus fumer, dans le métro il y a avait une odeur de spaghetti un peu dégueulasse. Je regardais partout, les yeux grands ouverts, étrangement consciente d’être en vie, les deux pieds sur le bitume, j’avançais, presque gênée de troubler la nuit, silencieusement. Et pourtant on parlait dans le métro avec Josiane on parlait on parlait on disait un peu n’importe quoi et aussitôt que j’ai été seule, le grand vide.

Je sais pas quoi dire sur Incendies , mais ça m’a fait du bien de vous dire que je savais pas quoi en dire.

Incendies, ça m’a donné le goût d’être vivante, de regarder, de sentir, de toucher même, je tortillais mes mains les unes dans les autres, j’ai laissé glissé mon bras contre l’escalier roulant, et en arrivant, j’ai réveillé ma voisine pour la serrer dans mes bras, j’avais envie que quelqu’un me sorte de mon mutisme.

Ce n’est pas un film parfait, ce n’est pas un film facile, accessible. C’est lourd. Et je crois que tout est dans les images. Ce qui, comparativement aux pièces de Mouawad dont on dit qu’elles sont très verbeuses (ceci dit en toute ignorance de la chose, je dois l’avouer)…et ben c’est ça.

Peut-être que dans quelques jours je vais pouvoir dire autre chose mais là, c’est beaucoup de mots pour rien.

Allez-y, en tous cas, allez-y voir le film. Ça vaut vraiment la peine. Même si on aime pas trop Rémi Girard pis qu’on est tanné de le voir, même si on se questionne, mmm, encore Maxime Gaudet, non,non, allez-y.

Mais allez-y en sachant qu’après ça, ça va être un peu plus dur de sourire. C’est tout.