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Mais ça ne fonctionnera pas, c’est clair que non. J’avais même prévu de faire une entête sérieuse, avec toutes les informations sur la pièce…enfin bref. C’est presque la fin de session, je n’ai même pas pu assister au cours de cet après-midi parce que je travaillais – trancher du jambon cuit, c’est tellement plus gratifiant qu’aller à l’université…enfin, enfin. Ce n’est pas le propos de ce – déjà! – dernier message blog de la session d’automne 2010.

J’ai décidé d’aller voir Noces de sang,  présentée sur la scène principale du théâtre Prospero du 16 novembre au 4 décembre 2010 parce que je ne voulais pas aller voir Dieu du carnage au TNM et c’était la seule autre pièce disponible.  J’ai un kick sur le théâtre Prospero habituellement, mais de moins en moins – Norway Today m’a  beaucoup déçu (voir l’article de Roxane à ce propos).

Après avoir survolé le site de la compagnie Caméra Obscura, initiatrice du Projet Tryptique Lorca, j’ai été grandement enthousiasmée. En effet, les créateurs de Noces de sang – de même que les acteurs – sont tous des finissants de l’École Supérieur de Théâtre, finissants de notre baccalauréat, issue de notre formation académique. Ça mérite le coup d’oeil, juste pour ça. Avec au sein des acteurs Alain Fournier, le directeur de notre programme, et Patrice Tremblay à la mise en scène, qui est également professeur au sein du baccalauréat – si je me trompe pas.

On connaît tous l’apport de Lorca à la dramaturgie mondiale, on sait tous aussi que parfois, certaines pièces vieillissent mal. D’où l’intérêt de l’adaptation contemporaine, à laquelle Amélie Hébert et Éloïsa Cervantes ont soumis le texte original de Lorca…une entreprise qui a plus ou moins fonctionné, mais nous en reparlerons plus tard. Force est toutefois d’admettre qu’en utilisant une telle technique, cela concorde avec la mission de Caméra Obscura : se consacrer à l’interprétation d’œuvres contemporaines et travailler la pluridisciplinarité au sein de leurs créations théâtrales.

Par où commencer ?

Noces de Sang est l’une des pièces capitales de l’œuvre de l’auteur espagnol, d’abord connu pour ses fresques poétiques. Il l’écrit alors qu’il vient de se faire nommer directeur de la société de théâtre étudiante subventionnée, La Barraca, qui avait pour mission de faire des tournées dans les provinces rurales pour ouvrir les yeux aux habitants sur le répertoire classique théâtral. Lorca s’inspire alors de ces régions d’Espagne dans son travail, tel l’Andalousie, d’où l’appellation «paysan» qu’on appose souvent à son théâtre. À cette époque, par sa manière de confronter le mariage (la raison) à la passion, sa pièce avait un propos révolutionnaire – un peu trop révolutionnaire même, puisque Lorca sera assassiné par des extrémistes de droite qui dénonçait ses propos trop libertins.

On parle de Noces de Sang comme d’une tragédie espagnole contemporaine teintée d’éléments surréalistes et aux personnages passionnés. Lorca souhaite faire de son théâtre un «théâtre du peuple», dans lequel les hommes seraient confrontés à la fois à la société dans laquelle ils vivent mais aussi au destin implacable auquel ils sont soumis. Par ailleurs, petite anecdote au passage, on associe Lorca au surréalisme parce qu’il était très proche du célèbre Dali. En fait, pour être potineuse à souhait, il était complètement amoureux de Dali. Il se serait inspiré des sentiments qu’il avait à l’égard du peintre pour composer ses pièces passionnées – ce qui n’était pas très accepté non plus pour l’époque…

La représentation que nous avons vu était une des dernières, nous avons donc assumé que le rythme de la pièce devait forcément être rodé et les acteurs être habitués à rouler celle-ci – dans une perspective d’avoir une bonne vision globale de la pièce, ainsi que pour savoir si l’objectif initial avait été atteint ou pas.

À la suite de cette heure et demie – qui m’a paru, à quelques moments, interminable –  j’ai pour ma part conclut que la pièce, malgré toutes les bonnes intentions des créateurs, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas avec cette adaptation de Noces de sang. Je vais tenter dans cette analyse de déterminer ce qui, à l’aide d’un extrait de la représentation, a cloché.

J’ai choisi la scène initiale de la pièce parce qu’à mes yeux, elle est à la fois déterminante, tant pour la suite de l’action et tant pour illustrer tous les éléments qui font en sorte que la représentation ne fonctionne pas. On voit la mère du fiancé qui lui tend un couteau et qui lui reproche de vouloir aller en ville. Comme c’est le début de la pièce, on s’attend à voir les assises de l’action. Le dialogue, presque blanc, laisse une grande liberté aux créateurs pour orienter dès le départ la tournure de la pièce.

C’est ce qu’ils font d’emblée : le fils, au lieu d’écouter sa mère, court de long en large de la scène, prend appuie contre les murs, se démène littéralement pour ne pas prêter une attention spécifique aux mises en garde de cette dernière. Les propos très poétiques de l’adaptation sont perdus dans le flot de mouvements, et nous sommes légèrement essoufflés par tant d’actions qui nous déconcentrent légèrement. C’est malheureusement ce qui se produira tout au long de la représentation.

(À date, je réussis bien à faire une analyse sérieuse, non ? Je suis plutôt contente de ma performance…mais ça aurait pu être mieux. Enfin. Continuons.)

Un des seuls accessoires de la pièce est présenté également dans cette séquence : le couteau, qui passe – malheureusement – presque inaperçu tout au long de la représentation, perdu dans l’explosion d’informations scéniques. La tulle de fond, qu’ils utiliseront à profusion durant la pièce, passe elle aussi inaperçue. Le tourbillon d’action masque les éléments scéniques importants : la scène épurée, l’absence de décors – en comparaison avec l’omniprésence des comédiens et de leur jeu très corporel. C’est ce qu’on nous plaque dès le début. La poésie alourdit l’atmosphère, la scénographie ne s’accorde pas bien avec ces deux tangentes (un texte lyrique, un jeu physique de danse-théâtre et de chorégraphies).

C’est probablement ça, le problème majeur de la pièce.

L’adaptation textuelle, avec les phrases clés, les phrases assez fortes, se perd dans le jeu très plaqué des comédiens. On semble toujours divisé entre favoriser le texte et d’autres procédés théâtraux. En tant que spectateurs, on se sent presque pris par la main : «venez, venez explorer avec nous un univers surréaliste et difficile à digérer ! Nous, nous, nous avons compris. Allez, vous allez comprendre aussi.»

Je sais que je verse toujours dans le commentaire, dans l’anecdote, dans le personnel, dans le subjectif. Je crois que je n’ai pas compris l’objectif du cours. J’ai adoré voir les pièces, écrire sur celles-ci, discuté avec les autres, confronter mes idées et mes perceptions. Je ne sais pas. Je ne suis peut-être pas assez profonde comme personne pour être capable d’analyser froidement une pièce sur des bases rhétoriques et sérieuses. J’accroche sur des pièces qui me bouleversent, qui m’attrapent en plein coeur, qui me tordent. J’aime être tordue. C’est ce qui a de mieux, au théâtre. Se sentir complètement happée par un texte, des mouvements, des humains, eux aussi. Des humains devant moi, qui vivent, qui ressentent des choses…

Il est vingt-heures quarante-cinq. Ma session se termine sur la fin de ce message. Le sort en est probablement jeté, je ne crois pas avoir une bonne note. Il faut croire que ce n’est pas si important, au final. Ce que je retire au niveau créatif et personnel de ce cours m’importe davantage que la lettre qui y sera associée.

Je m’étais dit que je ferais une véritable analyse.

Je veux dire, avec la méthodologie de travail. Suivre les consignes, les feuilles, les grilles.

J’étais fébrile, avant le spectacle. Déterminée à me surpasser. C’est que j’adore les blogs, voyez-vous, et je m’amuse beaucoup ici.

Et même si j’ai grommelé un peu, je trouvais les grands ados un peu tout croches un peu impolis presque attendrissants en entrant au théâtre. Après tout, on a tous déjà été dans cette situation-là. Je me disais, naïvement, que cette pièce allait peut-être faire naître chez quelques jeunes le désir flamboyant de poursuivre une carrière dans le domaine du jeu, de la mise en scène, que j’étais peut-être en présence de futurs étudiants de l’École Supérieure qui s’ignoraient – mais plus pour longtemps.

Bouteille d’eau à la main, le ventre plein de sushis, la lecture du programme achevée, je jubilais. Cela allait être une excellente soirée, je n’en doutais pas une seconde.

J’avais tort.

Et je déteste avoir tort, surtout au théâtre. Je déteste être déçue.

Mais ça allait au-delà de la déception, je pense. D’abord, la surprise. What the hell…

Ensuite, la consternation. Impossible. Ils ne peuvent pas être sérieux.

Puis, la révolte. C’est carrément une insulte à notre intelligence.

Et la recherche d’approbation des pairs.« Est-ce que…hum, tu aimes ça ? » « Non, si c’était pas pour le cours, je partirais. » « Ahhh, fiou! »

Et l’attente. L’interminable attente. Le regard mauvais aux ados-pu-si-cutes qui se frenchent bruyamment derrière. Dans la catégorie « Come on, la pièce est déjà insupportable, mâche de la gomme à la place ! » , on ne fait pas mieux.

Les pensées qui vagabondent. Je préparais mentalement mon message-blog. Je regardais l’heure aux cinq minutes. Mon regard errait vers la porte salvatrice. Plus que douze minutes…douze minutes…

Allons-y dans le concret.

Qu’est-ce qui ne fonctionnait pas avec cette version de « Jeux de massacre » ?

Beaucoup de choses.

En vrac,

-> Costumes aberrants. Des perruques sans doute achetées en solde hier, pour cause de liquidation du stock d’Halloween. Des costumes n’ayant aucun lien entre eux, pas – ou peu – de symboliques.

-> 1hrs40 de cris. De hurlements. De gémissements. 1hrs40 à perdre trois mots sur cinq parce que ça gueule, ça crie, ça s’arrache les poumons et la gorge. Entendons-nous. RIEN ne justifie une telle approche….sauf la maladresse. Je me serais boucher les oreilles sans problème. Des moments forts de la pièce étaient gâchés par les cris des comédiens. Un peu de retenue, un peu de profondeur ! Oui, c’est Ionesco, le théâtre de l’absurde, youppi youppi, mais ça n’empêche pas les personnages d’être humains. Comme il s’agit de la dernière pièce de l’auteur, les personnages sont forcément plus achevés que ceux des premières créations, ils ont des caractères plus étoffés – même si cela peut être dur, j’en consens, à développer en très peu de temps durant les courts sketchs, à asseoir ces nombreux personnages qui en font partie.

-> Musique qui n’appuie la pièce. Tout est dit dans l’intro du point.

-> Décors ridicules. Probablement en carton. Chambranlants. L’idée était à la base bonne, de créer un décor pouvant être manipuler, facilitant les entrées et les sorties innombrables des comédiens. Pourquoi des triangles ? Pourquoi la couleur beige-papier-de-construction-jaunie ? Je n’en sais rien.

-> Justesse du jeu…absente. Aucune justesse. On relève la performance de Marc-André Leclair, dans le rôle du maire/de la mort. On remercie sa présence scénique, son monologue amusant et la manière claire et honnête dont il rêvet ses personnages. On apprécie également sa voix grave et unique, et son faciès déroutant…même s’il me fut très difficile d’oublier qu’il travaille en talons hauts Chez Mado comme night job et de croire entièrement à son personnage.

-> Présence importante de cliché. Come on. La mort personnifiée par quelqu’un d’élégant alors que le reste des personnages jouent les pauvres. La mort clinquante, qui dit POW quand quelqu’un meurt. C’est déjà-vu, surutilisé, pu possible…à moins d’être fait avec une finesse rigoureuse et presque divine. Ce ne fut pas le cas. Les blagues grivoises à la je-touche-tes-fesses-pour-vérifier-si-ton-coeur-bat, les gags gratuits, un peu plus quelqu’un faisait tomber une pelure de bananes pour s’assurer du climax de l’histoire.

-> Les longueurs interminables. On aurait pu couper après une heure et des poussières, évitant ainsi le massacre total et complet de la pièce.

-> Le manque de jugement flagrant. Quel metteur en scène voit son spectacle se construire, se modeler, progresser, et ne perçoit pas toutes les failles pourtant tellement évidentes ? Durant la scène insupportable des scientifiques, je me suis réellement demandée s’il y avait quelqu’un pour regarder ça et se dire, wow, parfait, j’ai atteint un niveau artistique encore jamais égalé.

-> Le phénomène du «prof de Cégep». Je m’explique. Je comprends très bien qu’il soit dur, très dur même, au Québec, d’élever une famile, de payer des comptes, d’assurer son avenir en reposant uniquement sur le théâtre dans sa forme création, troupes et pièces professionnelles. Je suis même envieuse de ces gens qui arrivent à concilier un travail dans un établissement collégial avec leur passion, un day job. C’est parfait, sérieusement. J’y songe aussi. Bref. Pourquoi, bien souvent, trop souvent, les pièces qu’ils montent par la suite hors de leur Cégep ressemblent TOUTES à des productions faites pour des étudiants ?! Pourquoi la recherche esthétique/scénique/dramaturgique se résume trop souvent à … rien, ou si peu. Je ne saurais pas expliquer le désir, l’intention derrière la représentation que j’ai vu ce soir. Aucune recherche, aucune attention particulière, une pièce dénudée de sens. Une collègue me dit, oh tu sais, ils ont eu une demande pour monter ça, du Ionesco ! Ils sont sold-out ! Justement. C’est le sentiment qui se dégage de cette pièce. Faire du théâtre pour faire du théâtre, sans prétexte, sans raison, sans motivation, sans intention. Oui, c’est Ionesco. Oui, on ne monte pas Ionesco pour des raisons aussi profondes qu’on monte encore aujourd’hui Shakespeare. Mais pour l’amour du Ciel, peut-on monter Ionesco pour des raisons artistiques et pas seulement parce que ça fera remplir les salles d’écoles secondaires ? Je serais très curieuse d’entendre la justification des concepteurs du spectacle à ce propos.

Vraiment, complètement, totalement trempée. Parce qu’il ne faisait pas que pleuvoir, ce soir-là. Il neigeait. De la petite neige collante et fondante qui s’accrochait à mon manteau et qui le traversait comme s’il n’existait pas. Mes lunettes embuées par le changement brusque de température (neige-pluie-blasphèmes / chaleur-décorum-belles-personnes-qui-vont-au-théâtre-lustre-fascinant-de-l’Usine-C), je suis arrivée au théâtre à reculons, en retard – en plus!-, bougonne, fatiguée.

Ensuite…aussi bien annoncer mes couleurs tout de suite, j’ai un préjugé défavorable envers l’humour français.

Ça me donne mal à la tête, leur accent, durant un film ou une pièce. Je ne comprends pas les références culturelles, ni tout le vocabulaire, je ne me sens pas concernée, et je n’ai eu que des mauvaises expériences théâtrales avec la France.

Voilà, c’est dit.

Feel free to leave my blog.

Je continue.

N’ayant pas de programme à me mettre sous la dent avant le commencement, j’essaie de me remémorer ce qui fut dit en classe à propos de la pièce. Les bagages sont restés coincés à l’aéroport, les comédiens aussi, on essaie de jouer de notre mieux une version du Songe d’une nuit d’été. Bon. Respire, ça va bien aller. Le jeu des acteurs. Focus. Si seulement ça pouvait commencer… La gamine boudeuse en moi ne peut pas s’empêcher de gémir : impossible pour moi, à ce moment, d’être réceptive à la pièce. Je me débats avec un manteau humide, mes cheveux dégouttent sur mon front, j’ai honte d’exhiber une telle chevelure en public et les lumières ne se ferment pas, tout pour améliorer mon humeur.

20hrs10. Bing, bang. Les acteurs déboulent vers la scène et je suis déjà emmerdée. La mauvaise foi suinte de tous les pores de ma peau et je me désole de ne pas être assidue et curieuse comme Sara. Même pas la force d’adopter son attitude de c’est-à-qui-le-chien-chien. Les faux techniciens parlent,parlent,parlent, j’écoute, j’écoute, j’écoute, mes collègues rient et moi je souris poliment – ou du moins, j’essaie.

Mais j’ai mal à la tête et je rate un mot sur deux.

Il semblerait que mon air poli ne soit pas très convainquant – ou convaincu, puisque je divertie beaucoup mes voisines de siège avec mon air blasé. Donnez-moi une cigarette, une voix rauque, quelques dizaines d’années de plus, le portrait est complet.

Oh, je n’ai pas détesté « En attendant le songe ». C’était sympathique, c’était amusant, …c’était français. Mais contrairement à la majorité de mes confrères et consoeurs, je n’ai pas été happée par la folie et l’énergie du spectacle, ni par l’enthousiasme des comédiens, ni impressionnée par les nombreuses mises en abyme. Je reçois la pièce, j’approuve la démarche artistique, je la comprend, mais je n’ai pas été renversée.

Ça arrive, je crois.

C’est peut-être ma malédiction des comédies…même si je croyais l’avoir brisé.

Il y a deux semaines, je suis allée voir Il campiello, de Goldoni, mis en scène par Serge Denoncourt. Deux heures de divertissement pur et dur. J’ai ri comme je n’avais jamais ri auparavant au théâtre.

Et surgissent alors les questionnements habituels : pourquoi suis-je incapable de voir ce que tout le monde voit dans cette pièce ? Suis-je condamnée à me rabattre sur des comédies légères, du théâtre d’été, pour être divertie au théâtre ? Suis-je suffisament intelligente pour être là où je suis, dans ce programme ? Bonjour mon syndrome de l’imposteur, il y a longtemps que nous nous sommes vus.

Ceci dit, je ne crois pas que ce soit le cas. En fait, je ne sais pas. Que dois-je blâmer pour le déroulement de ma soirée ?

Moi.

Moi et moi seule.

D’autres circonstances, d’autres émotions, d’autres journées, mon attention aurait été complètement différente, et ma compréhension / appréciation aussi. Mais enfin, je peux tout de même tirer quelques généralités de mon expérience à l’Usine C.

Je m’appelle Amélie Faubert, je n’aime pas l’humour français et quand je suis mouillée, je n’arrive pas à me concentrer.

Après mon expérience plutôt désastreuse (et pénible) de «S’envoler», je m’étais promis que j’allais trouver une autre méthode pour apprécier à sa juste valeur ma visite au Musée d’Art Contemporain, lors de l’exposition sur Jon Pylypchuk, présentée du 8 octobre 2010 au 2 janvier 2011.

(J’admets ici ma perplexité : nous sommes allés au musée le 6 octobre…enfin,bon.)

De un, je suis tout de même plus familière avec l’art visuel qu’avec la danse contemporaine. De deux, j’étais accompagnée par un habitué de ce milieu, qui m’a patiemment entraîné dans les dédales du musée et de l’univers de Jon Pylypchuk.

Par où commencer ?

Quand je suis entrée dans la pièce où se trouvait l’oeuvre «War», je ne m’attendais pas à ça. Peut-être parce que je n’avais pas pris le temps de faire des recherches préalables – mais j’aime les surprises. J’ai cligné des yeux à quelques reprises, essayant d’assimiler ce qui se trouvait sous mes yeux.

Premièrement, j’ai vu Hedwidge, la chouette d’Harry Potter.

Ensuite, j’ai vu quelque chose comme une Pokéball…et un peu plus loin, un Pokémon.

Puis, la tête de métal, comme celle de l’épouvantail dans Le Magicien d’Oz

Après avoir partagé mes réflexions poussées avec mon camarade, on a également baptisé un masque mi-humain-mi-fourmi-comme-dans-le-film-de-fourmis-de-Walt-Disney.

En regardant de loin les masques, j’ai classifié mentalement deux catégories de masques : les masques-gentils et les masques-méchants. Les masques-gentils étaient ceux majoritairement ronds – ou ovales, avec des «visages» (ou à tout le moins des «yeux»…) Les méchants étaient ceux fait en matériaux hétéroclites et difficilement explicables, des espèces de…déchets.

Nous avons convenus qu’il s’agissait de masques d’« animaux robots». Pour ma part…je dirais que tout cela m’a fait pensé, en bout de ligne, au film The Nightmare before Christmas. Les personnages d’animaux déglingués, rafistolés, les textures les couleurs les formes, l’ambiance un peu creepy, le pathétisme qui se dégageait de l’ensemble…

Je suis troublée.

Les masques étaient disposés sur deux grands murs perpendiculaires, nous laissant croire à une continuité plutôt qu’à un combat entre les personnages. Une lumière propre à chaque masque est incorporé à celui-ci ; les masques ayant les plus fortes lumières se regroupaient au centre, à la jonction des deux murs. L’intensité diminuait ensuite sur les côtés. (Je n’ai pas vraiment d’interprétation pour ce petit détail…)

En m’approchant des masques, j’ai pu constaté que plus nous étions près d’eux, plus ils devenaient abstraits ; en reculant, ils reprenaient leurs «figures».

C’était comme une armée de jouets, des «p’tites bébittes qui s’amusent à vouloir faire la guerre». 

Il semblerait que pour le créateur, l’utilisation de matériaux recyclables soit très importante. Ça nous semble presque amateur.

C’est peut-être une facette relevant de fatalité dans ce travail artistique ; revenir vers les animaux en utilisant des moyens humains.

Dans le petit texte à l’entrée, il était écrit ceci : contingentes candides et cruelles de l’enfance.

Il semblerait que d’autres ont trouvé des mots plus beaux et précis pour décrire cet univers ludique, un peu trash et inquiétant…presque drôle, comique, pathétique.

Ce fut une très belle soirée, j’ai bien hâte de voir ce que vous en aurez pensé !

Silencieusement

J’allais écrire un article sur Incendies, le film tiré de la pièce de Wajdi Mouawad, mais je peux pas. Je peux juste pas.

J’ai aucun mot présentement pour décrire ce que je viens de voir. Plus je marchais vers l’appartement, plus les images me frappaient encore, à retardement ou en double. Je ne me souviens pas des dialogues, des répliques, je n’ai que des images à mute en tête. Des flashs.

Qu’est-ce que je pourrais dire de plus ?

Le gars assis à côté de moi sentait fuckin’ bon, en passant à côté de la brasserie Morelli à minuit, la porte était grande ouverte et ça sentait comme dans une brasserie dans mon petit patelin, le vieux cendrier même si ça fait presque cinq ans qu’on ne peut plus fumer, dans le métro il y a avait une odeur de spaghetti un peu dégueulasse. Je regardais partout, les yeux grands ouverts, étrangement consciente d’être en vie, les deux pieds sur le bitume, j’avançais, presque gênée de troubler la nuit, silencieusement. Et pourtant on parlait dans le métro avec Josiane on parlait on parlait on disait un peu n’importe quoi et aussitôt que j’ai été seule, le grand vide.

Je sais pas quoi dire sur Incendies , mais ça m’a fait du bien de vous dire que je savais pas quoi en dire.

Incendies, ça m’a donné le goût d’être vivante, de regarder, de sentir, de toucher même, je tortillais mes mains les unes dans les autres, j’ai laissé glissé mon bras contre l’escalier roulant, et en arrivant, j’ai réveillé ma voisine pour la serrer dans mes bras, j’avais envie que quelqu’un me sorte de mon mutisme.

Ce n’est pas un film parfait, ce n’est pas un film facile, accessible. C’est lourd. Et je crois que tout est dans les images. Ce qui, comparativement aux pièces de Mouawad dont on dit qu’elles sont très verbeuses (ceci dit en toute ignorance de la chose, je dois l’avouer)…et ben c’est ça.

Peut-être que dans quelques jours je vais pouvoir dire autre chose mais là, c’est beaucoup de mots pour rien.

Allez-y, en tous cas, allez-y voir le film. Ça vaut vraiment la peine. Même si on aime pas trop Rémi Girard pis qu’on est tanné de le voir, même si on se questionne, mmm, encore Maxime Gaudet, non,non, allez-y.

Mais allez-y en sachant qu’après ça, ça va être un peu plus dur de sourire. C’est tout.

Car il s’agit là plus que de simples notes de lecture éparses comme j’en ai la bonne ou mauvaise habitude. Il s’agit de comprendre dans ses basfonds un texte complexe, riche et vigoureux, où chaque virgule compte, où chaque mot s’enfonce dans la gorge du lecteur comme un couteau, où Müller désigne un à un les coupables de sa douleur infuse.

J’ai eu un premier contact avec Hamlet-Machine dans un cours de littérature, à la session passée. « Dramaturgie contemporaine » était assuré par un professeur littéralement passionné par les dramaturges allemands de l’après-guerre, Monsieur Stéphane Lépine – dont j’ai déjà vaguement parlé ici. Il nous parla avec une verve exemplaire de ce texte durant presque trois cours complets. De ces notes prises dans la hâte, presque haletante, je n’ai pu retrouvé que six – pauvres petites – pages. Elles constitueront la base de ma compréhension du texte. J’entreprendrai ensuite de compléter la lecture avec l’angle proposé lors du cours, c’est-à-dire considérer chaque scène individuellement, en dégager les personnages, les référents, etc.

J’avoue d’emblée avoir une préférence marquée pour les dramaturges de cette période d’après-guerre trouble, surtout chez les allemands – peut-être suis-je conditionnée par ce cours, je n’en sais rien. La plume de Müller m’a toujours profondément remuée – et peut-être que c’est seulement pour cela que je suis en théâtre, finalement, pour être remuée, renversée, étonnée.

Müller fut un homme d’idéaux, profondément marxiste, qui du tout de même accepter de se plier à quelques contraintes pour écrire. Malgré cela, il croit toujours qu’il serait possible d’instaurer un autre régime, un nouveau régime. Cette dévotion envers ses idéaux teintera non seulement son oeuvre mais également sa vie, puisqu’il aura toujours des problèmes à vivre dans une société qui ne l’accepte pas. Il tentera, dans ses pièces, d’allier son histoire personnelle à celle de la collectivité.

Müller entretient tout au long de son oeuvre un dialogue avec les morts, tant au niveau des écrivains morts que de ses propres morts. Il superpose adroitement la réalité des morts à la nôtre, qui nous contamine, qui est de plus en plus présente.

Les origines de Müller sont très pertinentes pour mieux saisir ses motivations à écrire ainsi, abordant de tels thèmes, d’une manière aussi puissant. Il est fils d’ouvrier, provenant d’un milieu viscéralement de gauche. Son père, figure primordiale dans sa vie, était un homme lui aussi foncièrement animé par ses idéaux : il croyait au « cheval blanc de Lénine ». En 1933, son père est arrêté en pleine nuit, enlevé, battu. Cet événement sera fondateur pour la construction de Müller en tant qu’artiste : lorsque son père appela à l’aide, il fit semblant de dormir. Toute son oeuvre prend racine ici, dans son silence, de sa lâcheté monumentale.

Sans grande surprise, Müller était très critiqué pour ses positions radicales. Il sera d’abord reconnu en Allemagne de l’Ouest et en France, le tout très rapidement. À la lecture de ses textes coup de poing, on comprend bien pourquoi.

Hamlet-Machine est écrit dans un contexte de tension politique extrême, sous lequel un artiste est constamment placé sous surveillance. L’objectif de ses premiers écrits ? Monsieur Lépine nous dit qu’il s’agissait de « jeter sur la scène des corps aux prises avec des idées. » Cela sous-entend la douleur, puisque « tant qu’il y a des idées, il y a des blessures. »

L’Histoire avec une majuscule, voilà le sujet premier de l’oeuvre de Müller. Comme je l’ai mentionné précédemment, il cherche toujours à saisir la déchirure entre l’histoire dite collective et l’histoire privé de tous et chacun. Peut-on ne plus être un objet de l’histoire, plutôt en être son sujet ?

Tout grand théâtre est marqué par l’histoire. Müller propose quelque chose de nouveau, un sujet d’avenir, l’idée selon laquelle le monde n’a pas d’avenir. Il croit en un théâtre comme outil de transformation de conscience, d’éveil collectif, et non pas comme une grande illusion réconfortante. Est-il possible de se raconter des histoires…pour ne plus s’en raconter?

Müller fait partie de cette génération d’auteurs allemands qui, suite aux génocides nazis, pense qu’il n’est plus possible pour eux d’écrire de nouvelles fictions. Le temps est venu d’affronter en face les horreurs de la guerre, il sera impossible à l’avenir de se voiler les yeux. Cela limite donc les textes à produire. D’une autre part, Müller se sent impuissant face à la grandeur des écrivains maîtres anciens, à la recherche d’une nouvelle fiction. Il croit sa parole inopérante, « alors aussi bien me taire. » Il prend cette résolution au pied de la lettre, il est donc réduit au silence puisqu’incapable de proposer quelque chose qui puisse répondre à ses idéaux, en ses croyances.

C’est dès lors qu’il débutera son dialogue de réécriture avec les textes anciens. Il opère ce choix pour la simple et bonne raison qu’il se sent incapable, en tant qu’artiste, de sortir de l’ombre de Shakespeare, qu’il estime beaucoup – et nous pouvons aisément le constater à la lecture du texte étudié. Müller se double d’une conscience qui s’inscrit dans l’Histoire et exhume les cadavres de jadis pour les réinscrire dans le présent, faire ressortir les victimes de l’histoire,leur redonner la parole.

Müller fut un homme de dualité, certes, mais les fractures dans ses textes ne sont jamais nettes, il y a un mur et une circulation souterraine compliquée – aucune étanchéité. Nous pouvons voir, avec justesse, Hamlet-Machine comme une véritable forêt littéraire, et il en était très satisfait : ses figures sont importantes et radicalement contemporaine, il veut leur faire retrouver leur radicalité, qu’ils cessent d’être uniquement des objets culturels.

Je me confesse : je ne connais rien à la danse contemporaine.

Je me confesse (bis) : je ne connais rien à la danse contemporaine et je vis très bien avec ça,
merci.

Je suis donc allée voir « S’envoler » sans avoir aucune attente précise.
Je suis sortie de « S’envoler » exactement dans le même état, neutre.

Je cherchais peut-être trop la trame, les émotions, les explications cachées derrière les
mouvements, les acrobaties, les pirouettes, l’eau qui giclait et les bottes qui crissaient.
J’attendais peut-être trop l’éclair, l’illumination, comme l’a dit une amie, le climax. Or, il n’est
jamais venu – à mes yeux, du moins.

Je ne crois pas être une personne cérébrale – loin de là. Je m’attendais peut-être trop à être
bouleversée, à être happée par la beauté de la danse et des corps et de la musique et du
moment. Je ne sais pas.

Je ne crois pas être en mesure d’analyser de manière très concrète et pertinente le spectacle
vu hier soir. D’abord parce que je sens que je ne maîtrise pas suffisamment le sujet (et le
vocabulaire associé), mais surtout parce qu’il semble que je sois passée à côté de quelque
chose involontairement.

Quelques impressions et notes éparses :

Il y avait dans « S’envoler » quelque chose d’organique, d’animal. D’abord dans la musique
et les sons – bruits ? – qui enveloppaient le spectacle. Un petit quelque chose du criquet, des
croassements, des jacassements d’oiseaux.

Je n’ai pas compris la démarche artistique derrière le projet. J’ai tenté d’être le moins
possible influencée par l’analyse thématique faite par Étienne, car de toute façon, je n’arrivais
absolument pas à voir la dualité et blabla. J’ai donc abandonné le projet de comprendre le
spectacle, d’être transcendée par les danseurs, etc.

Il m’a plutôt semblé que la bestialité humaine était à l’honneur tout au long de la
représentation. Montrée de manière tantôt subtile (tant dans les mouvements saccadés, les
mouvements libres qui semblaient provenir directement du département des pulsions), tantôt
de manière presque grossière (l’utilisation du masque du loup…que je n’ai pas compris…ni
durant le spectacle, ni après une nuit de repos).

Esthétiquement parlant, je n’ai aucune idée de quoi ont l’air des spectacles de danse
contemporaine habituellement. Cependant, j’ai trouvé que la recherche esthétique n’était
pas très grande – voire inexistante. Le jeu de lumière sur les pendrillons au tout début
semblait élargir la salle, lui donner une profondeur insoupçonnée, mais cela ne durait pas.
L’absence de décor était prévisible, mais je ne crois pas avoir saisi toute la signification
des costumes. Les vêtements chics, les vêtements quelque peu bohèmes, les souliers, les
bas, les couleurs ; je n’ai rien saisi de la recherche esthétique. Cela m’a conforté dans ma
compréhension du thème de la bestialité humaine, comme s’ils étaient des gens comme vous
et moi à qui l’on a dit allez-y, montez sur cette scène et lâchez-vous, vous pouvez faire ce que vous voulez !

Une impression de gros bordel organisé – mais pas tant que ça.

J’imagine que l’on peut voir dans les figures de groupe et dans les solos une certaine quête
individuelle, peut-être de l’acception de soi. Je suis comme cela, je fais ce que je veux, voilà.
Les danseurs semblaient très proches, unis, protecteurs.

Vous ne serez pas surpris de lire que je n’ai pas réellement compris la démarche artistique non
plus. Je suis peut-être de la vieille école mais tout au long du spectacle, j’ai cherché les
intentions derrière chacun des mouvements, ce qui les motivait. C’est un réflex tout à fait
théâtral que de chercher cela, pour éliminer le faux du vrai, voir si les personnages sont bien
construits ou si ce n’est qu’un enchaînement de pas et de gestes placés et calculés par une
tierce personne. Or, je n’ai pas pu y arriver avec « S’envoler ». Est-ce le propre de la danse
contemporaine ? Je n’en sais rien.

Et comme je l’ai mentionné précédemment, je ne suis pas certaine de vouloir réellement le
savoir.

Somme toute, je suis assez neutre face à tout cela. J’attends avec impatience la venue
d’Estelle Clareton au cours de lundi prochain, peut-être que les discussions amélioreront ma
compréhension et mon amour de la danse.

…ou peut-être pas.

Première semaine, trois courts textes à lire pour le cours de Séminaire d’analyse I.

On est un peu tard dans la nuit et je me décide enfin à disséquer ces pièces – mieux vaut maintenant que jamais.

1. Soirs de noces – Botho Strauss

Alors, alors. Une pièce d’un dramaturge allemand, contemporain de Peter Handke. Ça donne le ton.

Étienne (je prend dès lors la liberté de le tutoyer, à moins d’un avis contraire!) nous a posé quelques petites questions simples à répondre au sujet de l’extrait.

Où ?

Je dirais que l’action se situe…à l’église, à l’endroit où ils décident de se marier. Ou alors, dans une salle de réception, tout juste après le mariage.

Qui ?

On peut supposer qu’il s’agit d’un homme et d’une femme, grâce aux indications de lui et elle. Un couple, également.

Leur passé commun ?

On apprend qu’ils sont orphelins et qu’ils n’ont plus d’amis car ils les ont tous délaissé au profit de leur idylle.

Le temps ?

Samedi ou dimanche, puisque les seuls indices qu’ils possèdent sur la date de leur mariage sont les paroles floues d’un client chez un coiffeur. Lui croit qu’il s’agit du samedi, elle du dimanche. Ils tiennent peut-être là la raison pour laquelle personne n’assiste à leurs célébrations.

2. Va-et-vient (dramaticule), Samuel Beckett

Beckett. Beckett et les chemins de l’absurde. La destruction totale du sujet – j’ai quelques relents de mes cours en littérature. Je l’avoue : je ne connaissais pas cette pièce, et c’est avec une curiosité modérée que je m’y suis plongée. On peut ne pas être d’accord mais l’hermétisme de Beckett me laisse souvent pantoise et …indifférente. Je ne dois pas encore avoir été pénétrée par Beckett, ce qui est un peu contradictoire avec mon admiration pour le travail de Jarry. Enfin.

Les questions proposées par Étienne :

Quel est le mystère qui unit ces trois femmes ?

Je soupçonne que cela pourrait être un changement de niveau physique chez les femmes. Un grand malheur s’abattant sur elles.

Quelle est leur caractéristique ? Leur particularité ?

Elles se connaissent depuis l’enfance. Elles parlent entre elles des unes et des autres. Elles ont des rituels. On mentionne à la fin une bague.

Les indications scéniques de Beckett sont réputées pour être très précises et même à la lueur de celles-ci, je ne me permettrai pas de faire plus amples hypothèses sur la pièce.

Je dois par contre mentionner que ma curiosité modérée a été piqué au vif !

3. Hamlet-Machine, Heiner Muller

Ahhh…Heiner Muller. Je caresse presque tendrement l’extrait d’Hamlet-Machine posé devant moi. J’ai eu l’opportunité d’avoir un cours avec Monsieur Stéphane Lépine à la session d’hiver 2010, Dramaturgie contemporaine, au cours duquel il nous entretenait longuement d’ Heiner Muller. Je crois bien avoir quelque part chez mes parents des feuilles et des feuilles expliquant minutieusement les phrases de cet extrait. Malheureusement pour ma compréhension, je ne les ai pas sous la main.

Étienne nous demandait d’identifier les référents potentiels dans cet extrait.

Bon. Tout d’abord…Muller s’inspire largement des anciens mythes dans son écriture. Le premier référent évident est bien sûr Hamlet, de Shakespeare, mais Shakespeare lui-même.

Muller écrit à l’aube d’un jour nouveau, après les horreurs de la guerre. Est-ce encore possible de faire de l’art après avoir vécu tant d’atrocités ? Peut-on créer au-delà de la douleur ? Une douleur sans nom, impossible à abstraire. Muller évoque avec des images fortes la césure du peuple allemand, la culpabilité, dans une langue honnie, toute la saleté de la guerre et de la renaissance des cendres – littéralement.

Les écrits de Muller me dépassent largement trop pour que je puisse réellement tenter de les interpréter plus que mes pauvres tentatives ici présentées.

Je suis satisfaite de mes lectures, et très heureuse de constater que le blog est un outil particulièrement pertinent pour moi. Je songe à réitérer l’expérience de lire / blogger mes commentaires / notes / impressions de lecture.

J’emprunte à Jarry tous les titres jusqu’ici utilisés sur ce blog.

Moments accidentels.

C’est dans un cours de littérature que j’ai découvert ce terme que le dramaturge a glissé dans son célèbre article,  publié au Mercure de France en septembre 1896, titré comme ce premier article sur mon carnet de bord virtuel.

Après tout, qu’est-ce le théâtre si ce n’est que ça, une succession de moments accidentels ? La cohésion d’éclats, d’inspiration, d’erreurs, de tâtonnements. Façonner un monde avec des mots jetés sur un papier, prétendre pouvoir faire vivre des hommes et des femmes qui existent en chacun de nous, les rendre avec justesse, émotion.

C’est probablement pour cette raison que je me suis tournée vers le théâtre quand la littérature n’a plus su nourrir mon imaginaire. Avec le théâtre, les frontières sont uniquement celles que nous nous imposons. Au-delà de nos propres capacités, la portée des voix théâtrales se perpétue sans cesse.

De l’inutilité du théâtre…

Vraiment? Le théâtre est-il inutile? Je me dispute souvent avec un ami à ce propos. Le théâtre est-il un art élitiste, réservé seulement à un cercle sélect et serré d’initiés qu’il est difficile d’intégrer? Ou alors peut-il prétendre avoir conservé sa dimension sociale, rassembleuse, populaire?

…Au théâtre.

Je ne saurai m’en passer. C’est aussi simple que ça. À la question pourquoi étudiez-vous le théâtre?, il me brûle de répondre parce que je ne saurai en faire autrement – et ce n’est pas faute d’avoir essayé. Ce n’est pas une réponse très élaborée, mais elle a le mérite d’être franche. Tenter de dresser la liste exhaustive de ce qui m’attire dans le milieu théâtral est fastidieux. L’amour des mots, de la scène, mon trop-plein d’émotion continuel, peut-être même (sans doute!) l’égocentrisme obligé des aspirants comédiens, le désir d’innover, d’aller plus loin, de créer des univers uniques, intemporels, marquants. Et le ludisme, également. Jouer. Écrire. Mettre en scène. Créer. Faire de ces «passe-temps» ma vie.

Que contiendra ce carnet virtuel ?

Notes de lectures, impressions suite à des spectacles, notes de cours (pourquoi pas ?), réflexions. J’essayerai de nourrir cet espace quotidiennement – je l’espère! – pour enrichir mon parcours en Études théâtrales.

Rideaux ?